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Vue des Alpes

Vue Mont Blanc, des Aiguilles du Midi, des Blaitières, du Géant, du Glacier du Tacul, prise du sommet du Rocher du Couvercle
Vue des Alpes
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Oberman, publié en 1804, est à la fois un roman épistolaire, un essai et un journal intime. Un jeune homme se confie, par lettre, à un correspondant jamais nommé et dont les réponses ne sont pas retranscrites. L’écriture fragmentée est ponctuée d’ellipses et de points de suspension. Solitaire et tourmenté, Oberman se réfugie dans les Alpes et la forêt de Fontainebleau pour chercher la raison de son mal-être en société et découvrir l’ « harmonie » de l’univers. L’œuvre, se rattache au genre de la promenade-rêverie, prisé des esprits du 18e siècle et de Rousseau : la contemplation des paysages incite Oberman à des réflexions esthétiques, philosophiques et morales.

« Insensiblement des vapeurs s’élevèrent des glaciers et formèrent des nuages sous mes pieds. L’éclat des neiges ne fatigua plus mes yeux, et le ciel devint plus sombre encore et plus profond. Un brouillard couvrit les Alpes ; quelques pics isolés sortaient seuls de cet océan de vapeurs ; des filets de neige éclatante, retenus dans les fentes de leurs aspérités, rendaient le granit plus noir et plus sévère. Le dôme neigeux du mont Blanc élevait sa masse inébranlable sur cette mer grise et mobile, sur ces brumes amoncelées que le vent creusait et soulevait en ondes immenses. Un point noir parut dans leurs abîmes ; il s’éleva rapidement, il vint droit à moi ; c’était le puissant aigle des Alpes, ses ailes étaient humides et son œil farouche ; il cherchait une proie, mais à la vue d’un homme il se mit à fuir avec un cri sinistre, il disparut en se précipitant dans les nuages. Ce cri fut vingt fois répété ; mais par des sons secs, sans aucun prolongement, semblables à autant de cris isolés dans le silence universel. Puis tout rentra dans un calme absolu ; comme si le son lui-même eût cessé d’être, et que la propriété des corps sonores eût été effacée de l’univers. Jamais le silence n’a été connu dans les vallées tumultueuses ; ce n’est que sur les cimes froides que règne cette immobilité, cette solennelle permanence que nulle langue n’exprimera, que l’imagination n’atteindra pas. » (Senancour, Oberman, lettre VII. Saint-Maurice, 3 septemnre, I, 1804)
 

Bibliothèque nationale de France

  • Date
    18e siècle
  • Auteur(es)
    Jean-Antoine Linck (1766-1843), graveur
  • Provenance

    BnF, département des Estampes et de la Photographie, CA18C-1 (LINCK, JEAN-ANTOINE)-FOL

  • Lien permanent
    ark:/12148/mm132202359r